Oeuvres en réalité augmentée dans l’espace public, visibles sur six façades de la ville
Augmented reality artworks in public space
Bayeux, France
Les dessins invisibles de la ville, tels les graffitis de la cathédrale de Bayeux, sont la source d’inspiration de pan/aura/ma.
Justine Emard a conçu un parcours où ces signes graphiques cachés sont le scénario d’une plongée dans des univers parallèles augmentés. Une épave de bateau oubliée, un décor de cinéma surréaliste, des voiles évaporées dans l’espace, la déambulation labyrinthique créée par les élèves de l’École municipale des Beaux-arts matérialisent ces légendes méconnues, invisibles aujourd’hui mais pourtant matérialisées des centaines d’années auparavant “C’est que l’image n’est pas qu’un
fait sémiotique de renvoi, elle est aussi une puissance phénoménologique d’apparition – et donc de disparition : voir une image, ce n’est pas seulement croire ce qu’elle montre, c’est parfois, tout simplement, croire voir quelque chose, le temps d’un clignement des yeux.” *
En résidence à Bayeux, Justine Emard s’est intéressée à l’Histoire de la ville mais surtout aux histoires parallèles, cachées, moins connues. Elle a créé avec une perspective d’apparition et de disparition des images dans le paysage urbain. De la création et mise en scène de la Tapisserie de Bayeux, patrimoine mondiale de l’humanité, en passant par le “cinéma normandie” de quartier aujourd’hui abandonné jusqu’aux dessins de la cathédrale de Victor Hugo et de William Turner, on trouve un passé iconographique inspirant. Mais les représentations qui ont le plus attirés l’attention de Justine Emard sont celles qui sont cachées, invisibles comme les graffitis de la cathédrale, le dessin du château disparu de Bayeux et le labyrinthe sur le sol de la salle du chapitre de la cathédrale.
Dans les trois tours de la cathédrale de Bayeux, de nombreux graffitis ont été gravés dans la pierre, témoins d’un temps plus ancien. On ne sait pas beaucoup de choses sur leurs origines et leurs datations mais ils présentent des intérêts historiques et sociologiques d’une époque. Anonymes et spontanés, ils sont des témoins de la présence et le geste d’une personne, qui a décidé de laisser une trace iconographique. Les plus anciens graffitis sont des dessins datant de l’époque médiévale.
Parmi les représentations, des scènes étranges et fantastiques apparaissent, peu sont religieux. Des dragons jusqu’aux navires étranges en passant par des scènes violentes et crues de pendaisons. Ils sont souvent placés près des fenêtres, le graveur représentait sûrement ce qu’il voyait. Révélés par une position particulière de la lumière lorsqu’on veut les approcher, ces représentations font partie d’une mémoire physique des murs. Pour les regarder, il faut les chercher muni d’une lampe torche, dans une approche quasi archéologique.
Les « pan/aura/mas » sont l’incarnation de plusieurs dessins de graffitis repérés par l’artiste et traduits en environnements numériques immersifs afin de leur donner une nouvelle aura numérique. La réalité augmentée agit tel un révélateur. Pan/aura/ma est une tentative de transposer dans la réalité physique de la ville ces imaginaires, traces de présences passées et de les rendre sensibles pour le spectateur.