Android Opera Mirror au Théâtre du Châtelet 21,22,23 Juin 2023

Conception, composition, piano, électronique : Keiichiro Shibuya

Voix : Alter4 , Koyasan Shomyo

Orchestre : Appassionato / Direction musicale : Félix Bénati

Création Vidéo : Justine Emard

Programmation Android : Shintaro Imai

Design Android : Hiroshi Ishiguro

Informations ici : https://www.chatelet.com/programmation/saison-2022-2023/android-opera-mirror/

L’opéra s’ouvre avec la voix synthétique d’un androïde. Au centre de la scène, Alter 4 est un robot doté d’une intelligence artificielle. Il est accompagné de cinq moines japonais, d’un orchestre de cinquante musiciens français, ainsi que du compositeur Keiichiro Shibuya au piano et console électronique. Alter 4 est programmé pour chanter sa partition mais improvise aussi sa propre mélodie en se synchronisant avec le chœur des moines du Mont Koya. Certaines paroles sont extraites d’essais philosophiques et de romans, tandis que d’autres sont générées par son IA, d’après un corpus de chants bouddhistes millénaires.

Cet opéra engendre un nouveau modèle d’harmonie, transcendant le temps et l’espace, où le passé et le futur ne font plus qu’un.

L’androïde est un miroir.
La musique est un miroir.
C’est un reflet de vous-même.

Dix ans après le succès de The End, un opéra sans humains pour Vocaloid avec Hatsune Miku, Keiichiro Shibuya revient au Châtelet avec son œuvre la plus ambitieuse à ce jour, présentée en première mondiale, Android Opera Mirror.

Android Opera Mirror est une nouvelle forme d’opéra, où se rencontrent la technologie et l’expression humaine : un robot chanteur humanoïde doté d’une IA, l’orchestre Appassionato, un chœur bouddhiste japonais, le piano du compositeur Keiichiro Shibuya et sa musique électronique. Sur l’écran, l’artiste plasticienne Justine Emard créé des visuels en temps réel mixés avec les vidéos de l’androïde.


Co-réalisation
Théâtre du Châtelet, ATAK, The Japan Foundation

ARTICLES
https://information.tv5monde.com/culture/video/un-opera-virtuel-grace-lintelligence-artificielle-2649805

https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/paris/video-une-ia-et-un-androide-deviennent-chefs-d-orchestre-le-temps-d-un-opera-2799506.html

Une image vivante*
Justine Emard

Le titre “Mirror” évoque pour moi les neurones miroirs, qui reflètent le monde extérieur dans notre intériorité et génèrent de l’empathie. C’est dans cette aventure intérieure que les visuels du spectacle s’immiscent. 

Mes œuvres mettent en scène la dimension de l’apprentissage entre l’être humain et la machine. J’observe comment nos existences sont influencées par la technologie, ce que nous pouvons apprendre d’elle et de nous-mêmes, jusqu’à la dimension de l’émergence. Dans mes installations, j’aime créer un point de contact entre différentes évolutions de la technologie de l’image, depuis la préhistoire jusqu’à l’intelligence artificielle et les sciences computationnelles.

Après la boulimie de production d’images du début du XXIème siècle et l’imminente tempérance numérique, nous entrons dans une ère de la post-image. Ce qui se joue dans ce tournant historique avec les progrès récents de l’intelligence artificielle est en train de redéfinir notre relation, nos empreintes, nos usages et notre méfiance envers les images.En parallèle, des chants millénaires sont conservés par la tradition orale de l’apprentissage. Cette réalité de 2023 est le point de départ d’une expérience de l’image multidimensionnelle

Le dispositif vidéographique créé pour le spectacle prend son origine dans la perception des machines. Qu’est-ce qu’une machine peut percevoir d’un environnement et de chants bouddhistes millénaires et de notre XXIème siècle ? Je me suis rendue dans la forêt du mont Kōya ainsi que dans ses temples, où vivent les moines présents sur scène. Grâce à leur complicité, j’ai réalisé des captures topographiques des lieux, dans une dimension quasi documentaire, grâce à des outils spécifiques. Un capteur LIDAR industriel et des scans 3D composent la structure des images, dans une tentative de capturer l’essence du mont sacré. Les rochers silencieux, les racines apparentes, les sculptures recouvertes, un feu sacré : les objets aspirés sont recomposés en temps réel, tel un palais de la mémoire qu’on peut revisiter à l’infini. 

Le robot androïde Alter 4 est présent sur scène. À mon sens, il agit comme une interface entre toutes les entités. Réagissant à son environnement, Alter 4 délivre une forme de conscience machinique, tel un reflet de nous-mêmes. Scanné en 3D, il devient une visualisation externe de sa présence au monde et nous permet d’entrer au plus proche de ses représentations simulées. Comme des neurones miroirs, l’image vidéographique nous fait entrer dans ses potentielles simulations intérieures. Mettant en scène cet apprentissage par imitation, une forme d’empathie se crée entre présence sur scène et présence à l’image. Par extension, l’empathie s’ouvre sur nos liens envers autrui et la différence.

Cette image computationnelle, je la travaille en temps réel, connectée à la vie sur le plateau. L’environnement numérique génère devant nous une image vivante, en perpétuelle évolution. Le format de la projection devient comme un décor en feedback. Rien n’est figé : tout le processus d’apparition des images est basé sur le moment, entre ressenti de l’expérience live et influence des chants et du son sur les pixels.

Dans un souffle connecté, partagé par les différentes entités, le dispositif vidéographique anime le synthétique et le vivant. Les visuels fusionnent le rapport formel entre la boucle informatique et le mantra bouddhiste. Dans cette temporalité infinie, les œuvres visuelles ouvrent une nouvelle matérialité de l’instant. 

*Texte écrit en Mai 2023 pour le livret du spectacle

 

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