Vernissage « Oral Texte » le lundi 20 juin à 18h – Fondation Pernod – Ricard

Oral Texte
 Lundi 20 juin de 18h à 21h 

Artistes : Davide Balula, Clarissa BaumannJulie Béna, Angélique BuissonJustine EmardAurélie Ferruel & Florentine GuédonLola GonzàlezZhana IvanovaPauline LecerfCamille LlobetAgnès Thurnauer
 Commissaire : Christian Alandete
Avec une performance de Davide Balula à 19h


https://www.fondation-pernod-ricard.com/evenement/oral-text?page=1

Vue d’exposition : Aurélien Mole

– Où se trouve votre œuvre ?
– Là, là où je parle en ce moment.

Yves Klein, L’évolution de l’art vers l’immatériel (Conférence à la Sorbonne 1959)

A l’occasion des 10 ans du programme « Partitions (performances) », organisé à la Fondation Pernod Ricard, autour des formes artistiques de la conférence, « Oral Texte » propose de revenir sur les origines du langage articulé. De l’oralisation du son à son articulation en système de signes, la parole devient le mode de communication privilégié de l’espèce humaine dont elle serait le dénominateur commun. Dans un espace saturé de discours, les artistes invité.es proposent d’évaluer ce qui se passe au-delà du discours, dans un rapport renouvelé aux capacités de la voix à transmettre un message, à communiquer sous une forme codée dont le système parfois nous échappe.

La conférence est une forme d’échange qui mobilise un participant qualifié sur un sujet particulier face à un auditoire susceptible d’adhérer au discours énoncé ou de le remettre en question. La conférence peut être scientifique, académique, philosophique, citoyenne, internationale, de presse ou des évêques. La conférence est une performance du langage articulé, définie par un ensemble de règles, s’inscrivant dans un dispositif de prise de parole, dissociant l’énonciateur des récepteurs du message, en les tenant à distance.

Au tournant des années 2000, des artistes de la scène française se sont saisis du langage et de la conférence pour en faire la matière même de leurs œuvres, en utilisant un dispositif séculaire, pour mieux déconstruire le discours autorisé, au moment où l’art était plus que jamais adossé au langage et qu’il fallait remettre en question le discours d’autorité[1]. Ces années marquaient la fin d’une croyance aveugle en l’œuvre d’art comme objet transcendant, dont l’expérience esthétique se passait de commentaires et dont Malraux avait compilé les plus beaux spécimens dans son musée imaginaire. Depuis l’apparition de la médiation culturelle au milieu des années 1990, l’œuvre d’art s’était parée de discours autorisés, visant à produire de la relation, via le langage, entre l’œuvre et son public, qu’il était temps de se réapproprier.

C’est cet héritage qui a certainement contribué à innerver l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes prêts à prendre la parole non plus pour dire leur pratique mais pour la créer sous nos yeux. Depuis 2011, Partitions (Performances)[2] a accueilli près de 150 artistes, produisant des conférences performées, pour la grande majorité, inédites, à la Fondation Pernod Ricard. Détournant les codes de la conférence en déconstruisant un dispositif si universel qu’on pourrait le penser neutre, ces artistes se sont emparés des différents régimes de discours pour mieux en révéler les mécanismes, les dynamiques et les défaillances.

Pour conclure cette décennie de performances, Oral texte propose de regarder ce qui se passe avant le discours. Ferdinand de Saussure, dans son « Cours de Linguistique générale » en 1916, rappelait que la fonction du langage, telle qu’elle se manifeste quand nous parlons, n’est pas naturelle. L’appareil vocal, comme instrument de la langue, est le fruit du hasard, une capacité que l’humain (et certains oiseaux) ont développé pour communiquer. L’exposition propose une traversée de la langue :  les babillements d’un bébé qui découvre sa voix et sa capacité à moduler des sons (Camille Llobet), ceux émis par un robot animé par une intelligence artificielle qui découvre le langage au moment de sa mise en route (Justine Emard), une langue de feu des origines de l’espèce humaine (Davide Balula), les langues sifflées des hauts plateaux (Aurélie Ferruel et Florentine Guedon), celle imaginaire développée dans le plus grand secret par deux sœurs (Lola Gonzàlez), celle que l’humain a volé aux oiseaux (Clarissa Baumann), son érotisation par les chuchotements envoyée depuis l’intimité de sa chambre aux anonymes des réseaux (Zhana Ivanova)… Parfois la voix se perd dans l’océan, ultime contact des navigateurs en détresse (Pauline Lecerf) ou se refuse comme Janmari, cet enfant autiste qui trace au fil des pages de son journal les ronds d’une bouche qui ne veut émettre aucun son et dont les « poèmes » sur toiles d’Agnès Thurnauer semblent en être l’écho. Convoquant récits, mythes et légendes, les artistes nous invitent à repenser nos manières de communiquer avec l’autre qu’il soit notre semblable ou d’une autre espèce (Julie Béna, Angélique Buisson).

L’exposition déplie différents modes opératoires de nos rapports à la langue, couvrant une variété de medium qui dépasse les attendus de la performance : vidéos, installations, peintures, sculptures occupent les espaces d’exposition avec un temps d’activations programmé chaque semaine dans l’exposition ou dans les espaces de la Fondation Pernod Ricard.

En marge de l’exposition, une sélection de captations des performances réalisées au cours de cette décennie de programmation Partitions (performances) à la Fondation Pernod Ricard permettra de mesurer la diversité des dispositifs mis en œuvre par les artistes et leurs capacités à repenser le discours savant en puisant dans différentes disciplines scientifiques.

[1] Voir Jacques Rancière, Le maître ignorant, Paris, Fayard, 1987

[2] Un premier programme de performances Fictions (lectures performées) associant artistes des arts visuels et écrivains contemporain a été créé par Christian Alandete et Agnès Violeau à la Fondation Ricard entre 2008 et 2011.

La Fondation est ouverte du mardi au samedi de 11h à 19h, le jeudi en nocturne jusqu’à 21h et le lundi sur rendez-vous. Visites guidées le mercredi à 12h30 et le samedi à 12h30 et 16h. Entrée libre.

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